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Communautés d'énergie, politiques énergétiques territoriales et solidarité nationale
La notion de communautés énergétiques a été introduite en 2016 par l'UE dans le cadre d'appels à projets collaboratifs. S'appuyant sur des piliers comme "énergie propre" et "société inclusive", ces appels à projets visent à capitaliser sur les expériences et la diffusion des meilleures pratiques dans différents contextes nationaux autour des "communautés d'énergie renouvelable". Le 4ème paquet climat energie consacre ces communautés énergétiques en posant le droit à l'autoconsommation, garantit que les consommateurs qui produisent de l'électricité dans leurs installations sont autorisés à la consommer et à installer des systèmes de stockage sans devoir payer de frais, de redevances ou de taxes et que les consommateurs puissent rejoindre les communautés d'énergie renouvelable sans être soumis à des conditions ou procédures injustifiées.
En France, ce principe se heurte aux dispositions en matière de solidarité nationale organisée autour de mesures type "tarif timbre poste", de péréquation tarifaire, de tarifs de vente réglementés et d'autres, articulées pour avoir un prix d'accés et de consommation de l'énergie identiques pour tous les citoyens, quelle que soit sa localisation sur le territoire français. L’enjeu majeur en France est d’assurer la distribution de l’énergie (gaz, électricité, chaleur) sur l’ensemble du territoire et de veiller à la qualité du service public. L'apparition de la notion de "communautés énergétiques" en France se focalise sur l'antagonisme autonomie vs solidarité d'où émerge la question de leur gouvernance. En parallèle, la politique énergétique française a évolué, Avec les vagues de décentralisation et la libéralisation du marché de l’énergie en Europe à partir de 1996, le rôle des collectivités a connu de nouvelles évolutions. Dans ce cadre, la mise en place d’une politique énergétique décentralisée est valorisée : d’une part, le rapprochement du lieu de production de l’énergie de son lieu de consommation est jugé responsabilisant, d’autre part, le caractère transversal de l’action locale (aménagement, urbanisme, transport, etc.) plaide pour une approche globale de la question de l’énergie. Ensuite la loi de Transition Energetique de 2015 a institué le droit à l'autoconsommation, les territoires à énergie positive (TPECV) et le droit à l'expérimentation dans ce domaine. Puis la CRE a ouvert en 2018 une première voie pour l'autoconsommation collective.
On le comprend, le principe de solidarité nationale serait remis en question par les communautés qui, autoproduisant et autoconsommant les énergies locales, bénéficieraient, pour ceux qui peuvent tirer partie de leurs capacités d'investissement et de gisements facilement accessibles, d'un prix d'exploitation interne inférieur au prix national et continueraient à bénéficier d'une infrastructure publique dans les moments qui nécessiteraient d'y faire appel. Ses modalités de calcul et son assiette étant ce qu'ils sont, le financement de cette infrastructure serait alors assuré principalement par les autres consommateurs. De moins en moins de consommateurs finançant une infrastructure à coûts fixes tend vers des inégalités insupportables. De l'autre côté, cette position limiterait les initiatives territoriales vers cette transition énergétique. Ceci étant posé, il est utile de différencier communautés énergétiques et territoires à énergie positive. Il ne sera pas fait mention de taille, de superficie, de nombre d'habitants, de statuts privés ou publics, de compétences administratives ou autres ontologies pertinentes mais d'horizons temporels. Ce qui distingue communauté et territoire, dans le domaine de l'énergie, c'est le pas de temps dans lequel l'une et l'autre s'inscrivent. Tout territoire homogène peut avoir sa propre politique énergétique responsable, sa stratégie et sa planification, qui tendent vers un territoire dont les besoins d’énergie ont été réduits au minimum et sont couverts au maximum par les énergies renouvelables locales. Une communauté aura en plus le devoir d'assurer la continuité d'approvisionnement aux usagers, à tout moment et en tout lieu de son périmètre géographique. A un coût d'exploitation minimum, délivrer un service énergétique satisfaisant. En France, la "personne morale organisatrice des opérations d'autoconsommation collective" a un devoir de gérer les flux énergétiques locaux, 24h/24, 7j/7. Ses outils devraient inclure la gestion des flux avec l'extérieur et prendre en compte à tout moment l'état et la situation du réseau externe. C'est possible avec les "Grid Codes". Reste à considérer les évolutions futures des modalités de calcul et d'assiette du TURPE